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JUGEMENT
JUGEMENT. On nomme ainsi le résultat d'une opération qui s'exécute dans l'organe 
de l'intelligence entre deux idées ou davantage, rendues à la fois présentes à 
l'esprit ; résultat qui constitue une idée nouvelle et souvent plusieurs. 
L'opération qui amène ce résultat consiste en ce que plusieurs idées étant à la 
fois rendues présentes à l'esprit, les traits de chacune d'elles, mis en 
mouvement, se réunissent alors, soit en mélange, soit plutôt en opposition, et 
forment aussitôt, dans l'espace que je nomme le foyer de l'esprit, un ensemble 
de traits divers ; ensemble qui constitue une figure, une image nouvelle. Or, 
cette image offrant les rapports entre les idées employées, et faisant ressortir 
les différences qui les distinguent, caractérise l'idée nouvelle, amenée par 
l'opération. A l'instant, cette idée devient sensible ou perceptible à 
l'individu, étant transmise à son sentiment intérieur par la communication qui 
existe entre le foyer de l'esprit et celui des sensations ; et aussitôt le 
sentiment dont il s'agit la fixe et l'imprime dans l'organe. C'est aux rapports, 
aux différences, aux particularités que présente cette même idée, que nous 
donnons le nom de conséquence, de jugement ; et c'est à l'acte particulier qui 
s'exécute dans l'organe de l'intelligence, et dont je viens d'esquisser l'ordre 
probable, qu'est dû le résultat qui constitue tout jugement quelconque. Pour 
saisir ma pensée à cet égard, voyez ce que j'ai dit à l'article idée, en 
traitant des idées complexes, et surtout l'article intelligence.
 

Le jugement, pour l'homme, ou autrement son pouvoir de juger, est, de toutes ses 
facultés, celle qui est la plus importante ; celle à laquelle il peut parvenir à 
donner l'étendue la plus considérable ; celle alors qui peut mettre entre lui et 
tous les autres êtres intelligens de notre globe, une distance énorme en 
l'élevant infiniment au-dessus d'eux ; celle qui constitue seule le but de 
l'intelligence, laquelle tend à tout connoître, à juger convenablement tous les 
objets ; celle, enfin, qui peut lui donner une supériorité, une dignité, 
qu'aucun autre être ici connu ne sauroit égaler. Mais la dignité dont je parle, 
n'est pas le propre de tout homme ; comme je le montrerai.
 

En naissant, l'homme n'apporte aucune idée acquise, et n'a encore exécuté aucun 
jugement ; il ne possède alors qu'une seule source d'action, que celle que 
constitue l'ins- [instinct] 

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